10 choses  à savoir sur les élections tunisiennes du 17 décembre

La Tunisie élit une nouvelle assemblée parlementaire le 17 décembre 2022, date commémorant l’immolation de Mohamed Bouazizi, devenue depuis 2021, la fête de la Révolution.

  • Feuille de route Cette élection est la dernière étape de la feuille de route controversée imposée par Kais Saied en décembre 2021. Cette feuille de route comprenait la consultation en ligne (e-estichara) de janvier à mars 2022, le référendum constitutionnel de juillet 2022. Aussi bien la consultation que le référendum ont été marqués par une faible participation. Entretemps, Kais Saied a pris le soin de nommer sa propre instance électorale en mai 2022.
  • Nouveau Régime Elle est la première élection depuis l’adoption de la constitution ultra-présidentialiste rédigée par Kais Saied et votée lors d’un référendum en juillet 2022. Après les deux tours de cette législative, une autre élection parlementaire fera suite à celle-ci, celle du conseil des régions et des districts.
  • « La Fonction législative » Les futur∙es député∙es entreront dans une assemblée très affaiblie : non seulement ils et elles ne constituent plus un pouvoir mais une « fonction », mais en plus, la nouvelle constitution ultra-présidentialiste ne leur assure aucun moyen de contrôler les actions du chef de l’exécutif, encore moins de le destituer en cas de violation grave de la constitution. Ces mêmes députés eux, peuvent être révoqués par leurs électeur∙trices.
  • Médias La campagne s’est distinguée par un conflit ouvert entre la HAICA (Haute Autorité Indépendante de Communication Audiovisuelle) et l’ISIE (Instance Supérieure Indépendante pour les Elections), où l’ISIE, nommée par Kais Saied a tenté de s’emparer des prérogatives de la HAICA en matière de contrôle des médias en période de campagne. Par ailleurs, ces élections ont vu plusieurs médias locaux les boycotter du fait de l’impossibilité de travailler sous la menace du décret-loi 54 sur « la lutte contre les infractions se rapportant aux systèmes d’information et de communication » imposé par Saied en septembre 2022 et qui criminalise « les fausses nouvelles ». Enfin, l’ISIE interdit aux candidat∙es de parler aux médias étrangers.
  • Mode de candidature Contrairement aux élections constituantes et législatives ayant eu lieu entre 2011 et 2019, les candidatures sont individuelles. Pour candidater, il faut présenter 400 parrainages, divisés également entre hommes et femmes, avec 25% de parrainages provenant de jeunes de moins de 35 ans. Ainsi, de plus de 15 000 candidatures en 2019, nous n’en dénombrons que 1055 aujourd’hui.
  • Fin de la parité La disparition des listes électorales (où la parité entre les genres et des quotas de jeunes étaient imposé∙es) au profit des candidatures individuelles s’est traduite par une baisse drastique du nombre de candidatures féminines qui ne représentent que 11,5% du total des candidatures. Les personnes âgées entre 23 et 35 ans représentent elles, seul 14% des candidatures alors qu’elles forment approximativement, le quart de la population.
  • Découpage Territorial La nouvelle loi électorale imposée par Kais Saied modifie les circonscriptions électorales selon des procédés arbitraires. De gouvernorat, les élu∙es sont aujourd’hui élu∙es au niveau des délégations. Toutefois, plusieurs délégations ont été séparées tandis que d’autres ont été unies. Cela entraine une grande inégalité démographique où des délégations peu denses en habitant∙es sont représentées par le même nombre d’élu∙es que des délégations plus denses.
  • Elu∙es d’avance Sept circonscriptions n’ont vu aucune candidature acceptée par l’ISIE, notamment à l’étranger. Ces circonscriptions feront l’objet d’élections partielles courant 2023. Dix autres n’ont vu qu’une seule candidature acceptée. Ainsi l’assemblée compte quelques élus d’office, notamment six à Tunis (Menzah, Soukra, La Goulette etc.).
  • Boycott Ces élections sont boycottées par la majorité des partis politiques (Ennahdha, PDL, Courant Démocratique etc.). Toutefois, quelques individus ayant appartenus à des partis actifs durant la transition démocratique (Nidaa Tounes, Mouvement Echaab), se présentent à ces élections.
  • Pénuries La situation économique s’est fortement détériorée durant les derniers mois. De nombreuses pénuries ont été déplorées. De plus, le FMI a annoncé le report de l’examen de la demande de prêt tunisienne de 1,9 milliards de dollars.

Les opinions représentées dans cet article sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement les vues de l’Arab Reform Initiative, de son personnel ou de son conseil d'administration.