Les dimensions sociodemographiques de la revolution du Jasmin

Police and security personnel protest against work conditions © Mohamed Messara / EPA

Le 14 janvier 2011, l’incroyable a lieu : après 23 ans de pouvoir absolu, le Président tunisien Zine El Abidine Ben Ali fuit le pays, sous la pression populaire. Les tunisiens, si avides de démocratie, comprennent rapidement qu’ils sont désormais en train d’écrire leur propre Histoire.

Cet article explore les dimensions sociodémographiques de ce qui sera certainement l’évènement politique majeur de ce début de siècle dans le monde arabe. Il montre dans quelle mesure la société tunisienne a rempli, à un moment précis de son histoire, tout un ensemble de conditions qui ont quasi naturellement poussé le peuple à se soulever pour exiger le départ de leur leader, et l’instauration d’une démocratie.

La réflexion s’articulera autour de quatre grandes parties. La première partie relate brièvement les faits, tout en rappelant que, malgré son caractère exceptionnel, la révolution du jasmin n’est pas le premier mouvement démocratique de grande ampleur émanant spontanément du peuple tunisien. En atteste l’historien Ibn Khaldoun et sa théorie du cycle politique.
La deuxième partie de l’article examine l’ensemble des phénomènes sociodémographiques qui ont favorisé l’avènement de la Révolution du jasmin. Les principaux phénomènes que je propose d’étudier sont les suivants : la jeunesse, l’urbanisation, l’emploi, l’éducation, le degré d’usage des NTIC,… D’autres dimensions émergeront certainement pendant l’avancement des travaux.

Dans une troisième partie, je montrerai dans quelle mesure la révolution du jasmin a elle-même été à l’origine d’un phénomène démographique, la migration clandestine.
La dernière partie de l’ouvrage examine les perspectives de la révolution du jasmin, avec un intérêt particulier pour les jeunes. Il s’agira d’examiner, en particulier, la représentation de la révolution et de ses acquis chez les jeunes tunisiens.

Les sources de nos recherches sont de trois ordres : il s’agit d’abord de notre propre vécu des évènements, puisque nous nous sommes retrouvé au cœur même des évènements qui ont secoué le pays - et qui continuent  de se dérouler aujourd’hui encore - depuis le 17 décembre 2010.

Nous avons également effectué une recherche documentaire approfondie, principalement à Tunis et à Paris. A Tunis, nous avons eu l’occasion de visiter des centres de recherche (Institut National des Statistiques, Observatoire National de la Jeunesse,…), ce qui nous a permis de mieux appréhender la dimension sociodémographiques de la révolution du jasmin, et en particulier chez les jeunes.

Nous avons également effectué une visite de travail à Paris, du 12 au 16 décembre 2012, au cours de laquelle nous avons eu l’occasion d’effectuer une recherche documentaire approfondie à l’Institut du Monde Arabe (IMA) et à l’Institut National des Etudes Démographiques (INED). Une deuxième mission à Paris a été programmée du 3 au 7 avril 2013, afin de rencontrer un certain nombre de personnalités scientifiques ayant travaillé sur le sujet, et en particulier Malek Chebel, Gilles Keppel et Youssef Courbage.

Pour compléter les données documentaires, nous avons également envisagé de mener une enquête auprès d’un échantillon a priori fixé à 200 individus à Tunis, en utilisant un questionnaire simple de 15 questions (voir annexe 5), dont une question « open », laissant libre cours à l’interviewé pour fournir des éléments de réflexion. Les résultats escomptés devraient nous permettre de mieux comprendre la représentation de la révolution du jasmin, les acquis de la période post révolutionnaire, mais également les « ratés » de cette dernière.

Les opinions représentées dans cet article sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement les vues de l’Arab Reform Initiative, de son personnel ou de son conseil d'administration.